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gand, ville occupée

1914/1918

gand, ville occupée 1914 / 1918

À la suite de l'entrée des troupes allemandes sur le territoire belge, le 4 août 1914, le pays est entraîné dans la Première Guerre mondiale. Fin octobre, le front se stabilise à l'Yser. Les parties en présence se lancent dans une guerre des tranchées meurtrière. À l'arrivée des Allemands, Gand échappe au pire. Par la suite, la ville est rarement pilonnée et elle sort relativement intacte du conflit. Mais cela ne signifie pas que la guerre reste sans conséquences pour les Gantois. Tout comme pour la grande majorité des Belges, pour eux les quatre années d'occupation sont synonymes de misère, de faim et de conditions de vie de plus en plus difficiles.

Jusqu'à présent, la commémoration de la Première Guerre mondiale a surtout accordé de l'attention à l'entrée des troupes allemandes, aux exactions commises à cette occasion et au front de l'Yser.

Dans « Gand, ville occupée », le STAM se concentre toutefois sur la vie quotidienne des Gantois. Une seconde thématique de l'exposition est l'importance de la photographie en tant que source historique, à la fois source d'information et outil de propagande. Entre l'été 1917 et l'automne 1918, une équipe d'une trentaine d'historiens de l'art, photographes et architectes allemands a réalisé plus de 10 000 prises de vue photographiques des principaux monuments et œuvres d'art belges, dont 1061 à Gand. L'exposition réunit un certain nombre de ces photos, conservées actuellement à l'Institut royal du Patrimoine artistique (IRPA) à Bruxelles, et des textes et matériels iconographiques détenus par les Archives municipales de Gand et d'autres institutions d'archives.

le début de la première guerre mondiale

Le 4 août 1914, les troupes allemandes font irruption sur notre territoire. Pendant leur avance, elles font preuve d'une grande cruauté : des villes sont impitoyablement pilonnées et, dans certains cas, incendiées. La population civile n'est pas épargnée, ce qui déclenche un important mouvement de fuite. Les conséquences de l'assaut de Malines (le 27 août) et de Termonde (entre le 4 septembre et le 7 octobre) se ressentent jusqu'à Gand. Entre fin août et la mi-octobre, près de 45 000 réfugiés arrivent dans cette ville. Après la stabilisation du front de l'Yser, fin octobre, la plupart de ces personnes repartent. Les premiers jours après l'invasion, le sentiment antiallemand domine dans plusieurs villes ; des familles allemandes qui y résident sont obligées de partir. Les atrocités commises par les Allemands, tout particulièrement l'incendie de la bibliothèque universitaire de Louvain, suscite l'indignation dans le monde entier. Par ces actes de cruauté, la guerre prend rapidement des allures de combat entre « la civilisation » et « la barbarie ». Afin de corriger quelque peu l'image des Allemands en tant que barbares (culturels), le « Kunstschutz » (Service de Protection artistique) est créé à l'automne 1914. Aussi contradictoire que cela puisse paraître à l'époque, ce service a pour mission de mieux protéger le patrimoine artistique belge. Il est évident que dans ce domaine, la distinction entre protection et propagande est ténue. C'est un Allemand, le Professeur Paul Clemen (1866-1947), qui dirige le Kunstschutz en Belgique et dans tous les autres territoires sous occupation allemande.

emmurés vivants dans une ville occupée

Les troupes allemandes arrivent à Gand le 12 octobre 1914. En tant que ville principale de la zone d'étape de la quatrième armée – une zone militaire composée de la Flandre-Occidentale, de la Flandre-Orientale et d'une partie du Hainaut –, Gand est placée directement sous commandement militaire, ce qui veut dire que le régime d'occupation y est encore plus dur que dans le reste de la Belgique. Les contacts avec d'autres régions du pays sont quasiment impossibles. La presse et le courrier font l'objet d'une censure sévère, la diffusion d'informations politiques est interdite. La vie quotidienne est marquée par les réquisitions incessantes. Au centre de Gand, les Allemands s'emparent d'un nombre croissant de bâtiments, à commencer par toutes les casernes. Le Kouter, où se trouvent entre autres la Kommandantur et la Pass-Zentrale, fait fonction de quartier général. Les armes sont entreposées et réparées au Château des Comtes, la bière et le vin sont stockés à la Grande Boucherie et les légumes au monastère Het Pand. Les soldats effectuent leur revalidation dans les hôtels et écoles de la ville et au Casino à la Coupure. Le Beffroi sert de poste d'observation antiaérien. Les véhicules militaires sont garés dans les hangars du port. La visibilité de l'armée, comptant environ 12 000 hommes, est très grande dans la ville. Des drapeaux allemands ornent les façades, des panneaux de signalisation en allemand sont accrochés aux murs et aux arbres, les cafés sont rebaptisés d'un nom allemand. La gare de Gand-Saint-Pierre est le nœud ferroviaire principal pour le transport des troupes et du matériel vers et depuis le front. Si les autorités ont déjà depuis quelque temps l'habitude de communiquer avec la population par le biais d'affiches, sous l'occupation le nombre de proclamations placardées sur les murs augmente sensiblement. Ces affiches, informant la population de toutes les nouvelles mesures qui ont été prises, émanent le plus souvent des autorités (militaires) d'occupation allemandes, des autorités belges (sur ordre de l'occupant ou non) et des comités d'alimentation locaux.

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contrôles d'identité

Les autorités militaires allemandes instaurent la carte d'identité munie d'une photo, que les Belges sont obligés de porter sur eux. Dans un premier temps, la pièce d'identité est uniquement requise pour quitter la zone d'étape, mais à partir de 1916 l'obligation d'en disposer est étendue à l'ensemble de la population. Pendant quatre ans, le Belge ne peut plus franchir les frontières de sa propre commune sans le laissez-passer adéquat. Toutes les photos nécessaires à ces documents consomment de grandes quantités de papier photographique, mais les réserves destinées aux professionnels sont limitées. Ces photographes font donc souvent des photos de groupe, puis y découpent les visages individuels pour les fixer sur les cartes d'identité.

pénurue et famine

Dès le début de la guerre, le ravitaillement s'avère le problème le plus épineux. La production alimentaire à l'intérieur du pays est insuffisante, le blocus maritime britannique empêche l'importation des vivres et les réquisitions par les Allemands aggravent encore la situation. Le 8 août 1914 déjà, la Ville de Gand met en place un « Stedelijk Comité der Volksvoeding » (Comité municipal de l'Alimentation populaire), qui distribue gratuitement de la soupe et du pain. À l'automne, la situation alimentaire devient cependant critique. Le 23 octobre 1914 est créé à Bruxelles le Comité National de Secours et d'Alimentation, qui centralise l'aide au niveau national. Les aliments sont achetés aux États-Unis par la « Commission for Relief in Belgium » (Commission pour le Secours en Belgique) et la distribution en Belgique est assurée par le Comité National, par le biais d'un réseau de comités provinciaux et locaux. Les aliments sont vendus par rations dans les « magasins américains ». En 1916, plus de 60 000 Gantois dépendent de cette aide alimentaire. Au cours de la guerre, le Comité multiplie ses activités, dont l'organisation de soupes populaires, la distribution de lait et de repas scolaires, l'aide aux chômeurs et l'envoi de colis aux prisonniers de guerre et aux soldats internés. À côté du Comité National, une trentaine d'organisations de secours plus petites sont actives à Gand. Mais ces diverses initiatives ne constituent qu'une face de la médaille. Dans de nombreux cas, la pénurie conduit au stockage des produits alimentaires, au marché noir et à des prix excessifs. Les « nouveaux riches » se voient affubler d'un sobriquet méprisant, « baron Savon » ; en effet, la pénurie de savon rend la fabrication d'un ersatz particulièrement lucratif.

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propagande et censure

Le 30 octobre 1914, le quotidien De Gentenaar proclame à la une : « Nous revoilà !! Après être restés silencieux pendant 18 jours, nous adressons de nouveau chaque jour la parole à nos lecteurs. » Même si sous l'occupation, tous les journaux sont soumis à la rigoureuse censure allemande, Het Volk, Vooruit, De Gentenaar, Gazette van Gent et Le Bien Public continuent de paraître plus ou moins durant toute la guerre. La soif d'informations est grande : en 1915, De Gentenaar est tiré à 45 000 exemplaires, Het Volk à 35 000 et Vooruit à 20 000. Seuls La Flandre libérale et Het Vaderland refusent de paraître sous le régime de censure allemand. À partir du 11 janvier 1915, la vente de tout quotidien non censuré à Gand est interdite. À côté des journaux familiers sortent aussi plusieurs nouveaux quotidiens, entièrement financés par les Allemands. Trois journaux à tendance activiste paraissent à Gand.

Présenter les nouvelles sous un autre jour, manipuler les photos… ce sont des phénomènes de toutes les époques. L'occupant allemand tente d'améliorer son image de marque à l'aide d'affiches et diffuse des photos sur lesquelles on voit des Allemands distribuer de la nourriture à la population.

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Un autre exemple de leurs manigances est l'histoire du zeppelin qui s'écrase à Gand. La nuit du 6 au 7 juin 1915, le pilote britannique Reginald Warneford réussit à abattre un zeppelin allemand. Le dirigeable prend feu et s'écrase sur le Couvent de la Visitation, au centre de Sint-Amandsberg. Des civils périssent dans la catastrophe, ainsi que quasiment tout l'équipage ; il n'y a qu'un rescapé. Les Allemands veulent faire croire qu'un aéronef des Alliés a été touché. Dans la presse – censurée – la nationalité du zeppelin est soigneusement gardée secrète et une photo du lieu de l'accident est truquée. Mais pour les Gantois et la presse alliée, il n'y a aucun doute : il s'agit bien d'un zeppelin allemand.


Photographische Abteilung der Kommandantur

C'est à la Kommandantur, le siège administratif des forces d'occupation, que les citoyens peuvent obtenir les tickets de rationnement et diverses autorisations. Fin 1915 est créé un département photographique, le « Photographische Abteilung » de la Kommandantur de Gand. Il surveille de près les photographes amateurs et contrôle leur équipement. Les conditions de travail des photographes professionnels se compliquent de plus en plus : ils doivent soumettre toutes les photos réalisées, leur travail est censuré, leurs appareils sont contrôlés chaque mois ou confisqués. Le « Photographische Abteilung » travaille aussi pour la propagande guerrière. Ainsi sont réalisés, en guise de « souvenir » du séjour des soldats allemands à Gand, des « Kriegs-Album » composés de photos représentant des militaires qui prennent la pose et des ouvriers au travail dans les ateliers, le tout clairement orchestré. Les albums contiennent des photos d'officiers en cours de revalidation au casino de Gand ou de soldats en partance pour le front. On voit à peine que la ville a aussi une population de Gantois, et encore moins dans quelles conditions celle-ci doit vivre.

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L' Econome à l'arret

En raison des réquisitions incessantes de matières premières et du démantèlement des machines, l'industrie tombe quasiment à l'arrêt après quelque temps. À Gand, des entreprises métallurgiques sont obligées de fermer fin 1914, suivies de filatures de lin (fin 1915) et de coton (1917), ce qui entraîne un chômage de masse. En mars 1916 la ville compte déjà plus de 38 000 chômeurs. À l'automne 1914 les autorités municipales emploient environ 6000 ouvriers à l'excavation – manuelle – du bassin Middendok, mais en juin 1916 elles mettent fin aux travaux. À partir de 1915, tous les ouvriers et employés au chômage perçoivent une modeste allocation, versée par le biais des syndicats. En 1917, tout le monde peut solliciter de l'aide auprès du Comité National de Secours et d'Alimentation, l'organisation qui coordonne l'assistance. L'armée allemande met des prisonniers de guerre aux travaux forcés dans l'industrie de guerre. Dès le début du conflit, l'usine de tréfilage de Gentbrugge, mieux connue sous le nom de « Puntfabriek », est aux mains des Allemands. La main-d'œuvre y est d'abord assurée par des soldats ouvriers, mais à partir de 1916 des ouvriers belges, ainsi que des prisonniers de guerre italiens, français et russes y sont mis au travail. Les conditions de vie des prisonniers de guerre russes sont particulièrement pénibles ; les rations qu'ils reçoivent sont dérisoires. Craignant les représailles allemandes, le bourgmestre de Gentbrugge, Maurice Verdonck, appelle la population à « cesser toute manifestation de commisération envers les prisonniers de guerre mis au travail ».

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misère noir

En 1916, la famine s'empire. C'est surtout dans les quartiers populaires comme Muide et Heirnis que le mécontentement grandit. Début juin a lieu une première action de protestation au Noordkaai, suivie le 20 juin d'une manifestation bruyante de quelques centaines de femmes à l'hôtel de ville, à la Halle aux Draps et à la Kommandantur, près du bureau allemand où la population vient retirer ses tickets de rationnement. Deux jours après, une nouvelle manifestation a lieu à l'hôtel de ville. Fin 1916 est créé le « Centraal Bureau voor Identificatie en Controle » (« Bureau central d'Identification et de Contrôle ») qui doit empêcher – ou du moins le tenter – les abus dans le ravitaillement. Pendant l'hiver 1916-1917, la situation alimentaire s'aggrave encore. Nombre de gens survivent en mangeant uniquement du pain et des pommes de terre. En 1917, les prairies et jardins d'agrément sont plantés de pommes de terre et de légumes. Les jardinets urbains deviennent des champs de pommes de terre, dont la récolte est destinée aux pauvres pendant l'hiver. Parallèlement, les distributions de viande, déjà limitées, deviennent de plus en plus irrégulières. Une pénurie de charbon se déclare aussi. Et comme un malheur n'arrive jamais seul, l'hiver 1916-1917 est particulièrement froid, la température descendant jusque -15°. Fin février, la population, déjà affaiblie, est de plus frappée par une épidémie de grippe.

déportations

À mesure que la guerre avance, la pénurie de main-d'œuvre s'aggrave de plus en plus en Allemagne. À partir d'octobre 1916, les ouvriers au chômage sont réquisitionnés en France occupée et en Belgique. À Gand, ils sont rassemblés dans les usines textiles près de la gare du Rabot, d'où ils partent le plus souvent vers le front de l'Yser, ou dans le Nord de la France pour y soutenir les efforts de guerre allemands en abattant des arbres, en installant des voies de chemin de fer, en creusant des tranchées, etc. En 1917 sont aussi réquisitionnés les Belges qui ont un emploi. L'année suivante ont même lieu des razzias dans les cafés et à bord des trams. À Gand, 11 782 personnes au total sont réquisitionnées, dont certaines à plusieurs reprises ; le nombre de réquisitions monte ainsi à 14 877. 333 personnes meurent de privations ; les 505 hommes qui rentrent à Gand entre le 1er janvier et le 30 mai 1917, ont chacun perdu en moyenne 18 kilos. Le cardinal Désiré Mercier, qui jouit d'un grand prestige international au cours de la guerre, et les évêques belges s'opposent immédiatement aux déportations. Elles prennent fin dans de grandes parties du pays début mars 1917, mais se poursuivent dans la zone d'étapes, et ce jusqu'à l'Armistice.

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d'innombrables réquisitions

Dès le début de l'occupation, les réquisitions et saisies de produits alimentaires et de matières premières marquent la vie quotidienne. C'est surtout en 1917, quand les effets de la guerre et du blocus britannique se font lourdement sentir en Allemagne, que littéralement tout est emporté : les objets de cuivre, de nickel et d'étain, tous les vélos (en mars 1917), des vêtements, tapis, matelas et chaussures, la récolte entière de noix et de noisettes (juillet 1917), du vin en bouteilles et en fûts (août 1917), de nouveau des vêtements, des tissus et des bandages (septembre 1917), des luminaires en bronze, cuivre et laiton (octobre 1917), tous les noyers (fin octobre 1917), des cousins, matelas et produits pétroliers, de nouveau des chaussures (novembre 1917), toutes les racines de chicons, tout le cuivre et toute la laine qui restent (décembre 1917). Les tuyaux d'écoulement en cuivre de l'Aula de l'université et les statues, entre autres, du Musée des Beaux-Arts, du pont Verlorenkostbrug, de la Poste et du théâtre Nederlandse Schouwburg sont emportés, tandis que le revêtement de cuivre de la toiture du Beffroi est enlevé. On retire 7204 kilos de cuivre pour le remplacer par des ardoises et du carton goudronné. Mais tout n'est pas déclaré et tout le monde n'est pas d'accord…

également des réquisitions au musée

L'occupant n'est pas seulement intéressé par la nourriture et les matières premières, mais aussi par les objets du patrimoine et les œuvres d'art. Quand la guerre éclate, le conservateur du Musée d'Archéologie dans la Lange Steenstraat, Alfons Van Werveke, cache plusieurs objets de valeur, dont les colliers et médailles des confréries de Saint-Georges et de Saint-Antoine.

Pendant la guerre, les Allemands emportent à Spandau, près de Potsdam, quinze arbalètes, trois épées et une bannière de la cavalerie prussienne, saisie par les Autrichiens en 1759. Tous ces objets sont rendus après la guerre. Les moules de la célèbre fonderie d'étain De Keghel à la Kortemunt sont également dissimulés au musée. La réserve d'étain de la fonderie, qui n'a pas été cachée, est emportée par les Allemands.

Bien évidemment, les Allemands souhaitent aussi s'emparer de L'Agneau mystique, la plus importante des œuvres d'art gantoises. Immédiatement après l'invasion allemande, le chanoine Gabriel Van den Gheyn (1862-1955), trésorier de la cathédrale Saint-Bavon et spécialiste de l'œuvre, décide de cacher les panneaux centraux de L'Agneau mystique. En compagnie de quelques personnes de confiance, il scinde le retable en différentes parties qu'il met en sécurité dans une maison de la Lange Steenstraat et une autre de la Schouwvegersstraat, et plus tard au couvent des Augustins. Les caisses contenant le tableau sont transportées et cachées sous des bouts de ferraille, des tuyaux de poêle et du bois à brûler. Les personnes concernées jurent de ne jamais révéler la cachette. L'opération reçoit le soutien du ministre d'État gantois Jules Van den Heuvel ; sur intervention de ce dernier, le ministre des Arts et des Sciences, Prosper Poullet, affirme dans une lettre du 30 août 1914 que le retable se trouve en Grande-Bretagne.

Peu après leur arrivée, les Allemands se mettent à la recherche de l'œuvre, mais Van den Gheyn leur explique qu'elle est à Londres. Après quelques hésitations, les Allemands acceptent l'explication, mais pendant l'été 1916 ils la remettent à nouveau en doute. Si dans un premier temps leurs recherches se concentrent sur la cathédrale, c'est en vain que leurs envoyés spéciaux passent le bâtiment au peigne fin. Van den Gheyn est soumis à un interrogatoire serré, mais il s'abrite derrière Van den Heuvel, en sécurité à Rome depuis 1915 en tant qu'attaché auprès du Saint-Siège. Début 1918, les Allemands réquisitionnent de plus en plus de maisons bourgeoises. Par précaution, le tableau est transféré dans une autre cachette le 4 février. Après la guerre, Van den Gheyn continue de taire obstinément l'emplacement des cachettes. En 1920, tous les panneaux du retable, y compris les panneaux latéraux acquis en 1816 par Guillaume III de Prusse et conservés à Berlin, sont de nouveau réunis à la cathédrale.

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L'inventaire photographique du patrimoine artistique Belge

Le Kunstschutz, créé à l'automne 1914, est dirigé en Belgique par l'historien de l'art allemand Paul Clemen. Avant la guerre, il avait effectué un inventaire du patrimoine artistique du pays rhénan. Dès le début de la guerre, il songe à établir un inventaire photographique du patrimoine artistique belge. Il parvient à réunir les fonds nécessaires et rassemble un groupe d'historiens de l'art et architectes allemands pour réaliser son projet, officiellement lancé en juin 1917. En Flandre-Orientale, les travaux sont dirigés par l'architecte et historien de l'art Christian Rauch, assisté à Gand par l'architecte Hans Vogts. Au total, ils réunissent plus de 1100 clichés, réalisés par divers photographes, dont Richard Hamann, Hans Holdt et Paula Deetjen.

Il ne faut pas s'étonner si cette collection photographique devient un instrument de la propagande allemande. En effet, selon Clemen, le matériel iconographique réuni démontrera que l'influence de l'architecture rhénane – donc allemande – s'étend jusque loin en Belgique, ce qui signifie sans détours que la Belgique et l'Allemagne partagent une même histoire culturelle. Par conséquent, cette initiative acquiert des facettes pour le moins étranges. Même pendant l'été et l'automne 1918, alors que la situation au front se complique de plus en plus pour les Allemands, les travaux photographiques se poursuivent sans faillir. Deux mois avant la fin de la guerre, le « Königlich Preussische Messbildanstalt » de Berlin réalise encore 92 clichés d'édifices religieux et profanes de Gand sur négatifs de verre de 40 cm sur 40, de très haute qualité. L'analyse des images démontre que la plupart du temps, deux photographes travaillent ensemble. Des photographes gantois sont également mis à contribution. Les 20, 22 et 23 juillet et le 14 octobre 1918, au total 31 dessins architecturaux des XVIIe et XVIIIe siècles, conservés aux Archives municipales de Gand, sont photographiés par Charles De Wilde.

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espionnage, résistance et exécutions

Pendant la Première Guerre mondiale, la « résistance » consiste à recueillir des informations sur les transports militaires et à aider les prisonniers de guerre évadés, ainsi que les jeunes Belges qui veulent rejoindre le front de l'Yser en passant par les Pays-Bas. Le grand nombre de femmes jouant un rôle dans les réseaux de renseignement est remarquable. Dans certains cas, l'aide apportée aux militaires débouche sur une collaboration à la presse secrète ou aux journaux clandestins destinés aux soldats. Afin de se protéger des soldats trop bavards, le commandement militaire allemand fait installer près des cafés des panneaux portant la légende « Für Deutsche Heerensangehörige verboten » (« Interdit aux membres de l'armée allemande »).

La possession clandestine de pigeons est également réprimée, car ces oiseaux peuvent transporter des lettres ou autres messages. Les sanctions sont de fortes amendes, voire des peines de prison allant jusqu'à deux ans. Les volatiles saisis sont enfermés dans des « prisons à pigeons ».

52 civils exécutés

Les Allemands utilisent le champ de tir municipal – Gemeentelijke Schietbaan – pour leurs exercices de tir, mais aussi – ou surtout – pour leurs exécutions. Au total, 52 civils, pour la plupart accusés d'espionnage, y sont exécutés. Il y a trois femmes parmi eux : Leonie Rammeloo, Emilie Schatteman et Marie Preenen-De Smet. Les fusillés sont enterrés au cimetière Westerbegraafplaats, à l'exception du vicaire Octaaf Declercq, inhumé au Campo Santo à Sint-Amandsberg. Après la guerre, la plupart des résistants décédés sont à nouveau enterrés, cette fois-ci avec tous les honneurs, dans leur ville ou village d'origine.

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De Smet Prudence 15 09 1917
Keppens Louis 14 09 1917
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Kaiser Wilhelms Weihnachtsreise

Le 23 décembre 1917, l'empereur allemand Guillaume arrive à Gand. En tant que chef-lieu de la quatrième zone d'étape, Gand a une grande importance stratégique derrière le front de l'Yser. L'empereur passe quelques jours en ville et y visite entre autres le Château des Comtes et la cathédrale Saint-Bavon. Il fête Noël en compagnie des militaires afin de relever le moral des troupes. La visite impériale est abondamment documentée par le biais de photos et de films, surtout destinés à des fins de propagande. Le film est réalisé par le Bild- und Filmamt (BUFA). Il nous en apprend beaucoup sur l'identité et le mode de travail des photographes. L'auteur des photos est probablement Henri Jäger, déjà actif à Gand avant la guerre, puis incorporé à l'armée allemande.

Cherchez le photographe dans la séquence de film et le cameraman sur la photo.

vers la fin de l'occupation

À Gand, l'administration communale composée de libéraux et de socialistes, installée en janvier 1912, reste en place jusqu'au 28 mars 1918. Le conseil communal approuve en janvier une motion de censure envers le « Raad van Vlaanderen » (Conseil de Flandre) activiste, qui a proclamé l'autonomie de la Flandre. L'occupant réagit immédiatement en déportant le bourgmestre Emile Braun et l'échevin Maurice De Weert au Schloss Celle près de Hanovre. En signe de protestation, les autres échevins, dont Edward Anseele, démissionnent ; des activistes prennent leur place. L'Allemand Franz Künzer, le maire adjoint de Posen, remplace Braun. Le 26 septembre est lancée la contre-offensive alliée sur le front de l'Ouest. Début novembre, les Gantois se voient interdire de quitter leur maison entre seize heures et huit heures du matin. Les Allemands tentent coûte que coûte de ralentir l'avance des forces alliées en faisant sauter tous les ponts ferroviaires entre les Stropbrug et Snepbrug, tout comme les aiguillages dans les gares et les grands rails. Dans les ports, les dégâts sont encore plus importants : les ponts entre Meulestede et Zelzate sont détruits, les entrepôts sont incendiés, les bateaux fluviaux sont coulés. Les ponts à l'intérieur de la ville et les écluses sont minés ; au Canal de Jonction, à la Coupure et à l'Escaut supérieur ces explosifs ne sont retirés qu'après de longues négociations. Les Alliés, de leur côté, visent surtout les gares et leurs environs immédiats lors de leurs bombardements. La destruction des voies de chemin de fer près de la gare de Dampoort cause aussi de sérieux dégâts à l'abbaye Saint-Bavon. Le Toreken du Vrijdagmarkt, où est installée l'artillerie, est également endommagé. En novembre 1918 les événements se précipitent. Le 8 novembre, le bourgmestre allemand Künzer quitte la ville, et le lendemain Edward Anseele devient bourgmestre faisant fonction. Le 10 novembre a lieu le départ définitif des Allemands, qui s'accompagne d'importants pillages. La population se venge des activistes en attaquant et pillant leurs maisons.

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L'euphorie de la libération

Le 13 novembre, les troupes belges défilent dans les rues de Gand. Le roi Albert, la reine Élisabeth et le prince héritier Léopold font leur entrée solennelle dans la ville. À partir du 15 novembre, les personnalités déportées comme le bourgmestre Braun, l'échevin De Weert et les professeurs Henri Pirenne et Paul Fredericq reviennent chez eux. Si la joie et le soulagement règnent, l'armistice ne résout bien évidemment pas tous les problèmes. Au niveau international, l'agitation sociale dans de grandes parties de l'Europe et la situation en Russie suscitent une grande inquiétude. Il y a aussi l'épidémie de grippe espagnole qui sévit depuis 1918 et qui finira par faire davantage de victimes que la guerre. À Gand, comme ailleurs en Belgique, les conditions de vie restent difficiles. Le rationnement alimentaire ne prend fin qu'en mars 1919, quand la vente libre de quelques produits reprend, mais à des prix nettement plus élevés qu'auparavant. L'économie tarde à redémarrer, car l'infrastructure a été détruite ou démantelée pour la plus grande partie et les matières premières ont été réquisitionnées. En mars 1919, la filature de lin Casier est le premier établissement industriel à reprendre le travail.

colofon

STAM

Maria De Waele, Rika Deltour, Anja Hellebaut, Kris Uyttersprot

IN SAMENWERKING MET,

Robrecht Janssen, Tim De Vocht, Koninklijk Instituut voor,het Kunstpatrimonium (KIK), Guy Dupont, Pieter-Jan Lachaert, Storm Call, Stadsarchief Gent (De Zwarte Doos) in het kader van het digitaliseringsproject ‘Met de rug tegen de muur: Tekstaffiches WOI’, Titus Simoens,stage Master Fotografie, KASK School of Arts Gent

GRAFISCHE VORMGEVING

Dooreman & Dams

PRINT

Printville

MET DANK AAN

Amsab-ISG, Universiteitsbibliotheek en -archief Gent, Stadsarchief Lokeren, Rijksarchief Kortrijk, Koninklijke Bond der Oost-Vlaamse Volkskundigen, Documentatiecentrum,voor Streekgeschiedenis dr. Maurits Gysseling vzw, EYE Filmmuseum Amsterdam, Museum Huis Doorn, STAMteam

MET DE STEUN VAN

Provincie Oost-Vlaanderen

Musée de la Ville de Gand

Bijlokesite
Godshuizenlaan 2 - 9000 Gent
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